Cet avis a été rédigé à Londres par Sir Edward Morris, pour les journaux de St. John's, après la bataille de Beaumont-Hamel; il y parle des visites qu’il a rendues à des hommes à l’hôpital de Wandsworth. Remarquez la date à laquelle les premiers blessés ont commencé à arriver à Londres.

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La Bataille de Beaumont-Hamel

L’histoire du 1er juillet racontée par Sir Edward Morris

Londres, le 10 juillet 1916. J’ai visité le 3e Hôpital général de Londres à Wandsworth pratiquement tous les jours la semaine dernière, depuis que les hommes ont commencé à arriver de France. Les premiers sont arrivés le mardi 4 juillet.

L’engagement, si on peut l’appeler ainsi, ou l’attaque des tranchées allemandes par nos hommes, a eu lieu le samedi 1er juillet, vers 9 h. Ils étaient cantonnés dans la tranchée appelée St. John’s Road, à droite de Beaumont-Hamel, où ils s’étaient rassemblés en vue de l’incursion dans les tranchées allemandes. Jusqu’à ce moment-là, ils étaient demeurés dans leurs propres tranchées, sur la troisième ligne de défense, à environ 400 verges des tranchées allemandes. On avait laissé dix pour cent des quatre compagnies à Louvencourt. Dans la soirée précédant l’attaque, à 9 h, ces hommes ont marché de Louvencourt jusqu’à la route de St. John’s, ce qui fait environ 7 milles, et sont arrivés à destination vers 1 h du matin.

Ils ont rejoint la 88e Brigade, et nos hommes étaient censés attaquer les tranchées allemandes sur leur troisième ligne de défense, à environ 5 000 verges de distance; les deux autres lignes de défense, c.-à-d. les nos 1 et 2, devaient être attaquées par les 86e et 87e Brigades. À 7 h 30, les 86e et 87e Brigades ont attaqué, mais n’ont pas atteint leur objectif, soit de nettoyer les lignes allemandes nos 1 et 2, de s’en emparer et de consolider leur position, après quoi le Bataillon de Terre-Neuve traverserait jusqu’à la troisième ligne de la défense allemande. Les 86e et 87e Brigades ont toutefois échoué, en raison de la forte concentration de mitrailleuses, et l’on a donné l’ordre au Bataillon de Terre-Neuve de prêter renfort aux 86e et 87e Brigades. C’est ce que les hommes ont fait. L’ordre avait été transmis du Commandant aux compagnies. On dit qu’on leur avait donné tous les détails de ce qu’ils devaient faire; ils se sont regroupés et on avancé en formation étendue : les Compagnies A et B en tête, les Compagnies C et D comme pelotons de soutien à 40 pas de distance, 25 pas séparant les sections. Tous ont alors marché avec l’espoir de s’emparer de la ligne de défense no 1.

Depuis plus d’une semaine, l’artillerie britannique avait bombardé avec des munitions de tout calibre cette région où se trouvait la ligne de défense no 1. Il s’agit d’un travail différent de celui de l’infanterie, qui n’avait rien à voir avec nos soldats. C’est entre 6 h et 7 h de ce matin du samedi 1er juillet que les Britanniques ont bombardé le plus intensément cette ligne de défense no 1.

Nos hommes ont avancé comme à la parade, marchant rapidement vers leur objectif. Après avoir traversé leurs propres défenses de barbelés, ils ont franchi un monticule gazonné jusque dans une vallée, sur un chemin détrempé, et ont remonté une pente douce vers les tranchées allemandes, ou la ligne de défense no 1 des Allemands. Ils y sont arrivés en environ 10 minutes. Ils avaient tous à peine quitté leurs propres tranchées et leurs propres barbelés lorsqu’ils ont essuyé un tir allemand de mitrailleuses, d’obus et d’explosifs détonants. Les armes semblaient avoir été montées sur des plateformes et sortir des entrailles de la terre, et plusieurs de ceux qui m’en ont fait rapport m’ont dit qu’autant qu’ils puissent en juger, les bombardements de la semaine et surtout l’intense bombardement de ce matin-là ne semblaient aucunement avoir nui à la capacité des Allemands de réagir à leur assaut. Toutefois, en dépit de cette pluie de balles de mitrailleuses, d’obus et d’explosifs détonants, nos troupes avançaient comme à la parade, n’hésitant jamais un seul moment, même si des hommes et des officiers tombaient tout autour d’eux. Cela s’est poursuivi jusqu’à ce que ceux qui restaient atteignent la première ligne des tranchées ennemies; il est impossible de dire combien ils étaient, mais ils ne représentaient qu’une petite section.

On ne pense pas que des hommes aient été faits prisonniers. Certains sont revenus à la lumière du jour, et la majorité de ceux qui sont revenus avaient dû se tapir dans des trous d’obus jusqu’à la nuit et revenir en rampant. Les tirs n’ont jamais cessé, et les hommes blessés gisant au sol étaient bombardés et abattus par les artilleurs allemands.

À minuit, on a fait l’appel et parmi ceux qui ont répondu, beaucoup avaient été blessés. En une journée, presque tous les blessés ont été recueillis et envoyés vers les divers postes de secours qui longeaient la route, puis amenés sans délai ou très rapidement ici, à l’hôpital. Le fait qu’environ 320 blessés soient arrivés ici entre le mardi 4 et le dimanche après-midi témoigne de la rapidité avec laquelle ce travail a été exécuté.

Je suis allé à l’hôpital tous les jours et j’y ai passé presque toute la journée de dimanche. Je constate que les hommes, qui se rétablissent tous rapidement, sont éveillés, contents et joyeux, et que leur principale préoccupation est d’y retourner rapidement. Le moral est formidable.

Rien ne peut dépasser la gentillesse et le dévouement des membres du personnel des divers hôpitaux; ils ont beaucoup d’affection pour nos hommes et ils font tout leur possible.

Ce rapport est loin d’être complet; je l’ai écrit à la main, par fragments, à partir de faits racontés par des hommes blessés, dont peu sont en mesure de raconter toute l’histoire. En fait, bon nombre de ceux dont j’ai obtenu ces renseignements étaient tombés à quelques verges de leurs propres tranchées, très tôt dans la journée. Jusqu’à maintenant, bien sûr, l’état-major n’a publié aucune dépêche, ni rien d’officiel outre les simples listes de morts et de blessés.

Jusqu’à ce midi, le lundi 9 juillet, le nombre total des officiers et des hommes tués ou morts de leurs blessures s’élève à 16; le nombre des blessés, à 360; le nombre des hommes qui manquent à l’appel, à 6; pour un total de 382 hommes.

Aucun des officiers et des hommes que j’ai interrogés ne pouvait me donner une estimation du nombre des pertes humaines.

E. P. Morris.

Source : The Daily News, le 28 juillet 1916.

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