Red Head Cove
Le 13 juin 1918

Monsieur,

J’ai reçu votre bonne lettre de condoléances et je vous remercie beaucoup pour vos mots de consolation et ceux du gouvernement, en ces moments de grand chagrin pour nous. Nous devons tous un jour ou l’autre quitter ce monde quand Dieu nous appelle, comme mon fils, appelé à une mort précoce, me laissant rempli de chagrin et portant son deuil. C’est un honneur pour moi‑même ainsi que pour lui de savoir qu’il est mort en soldat et a répondu à l’appel du devoir. Comme vous l’avez dit, j’espère qu’il porte maintenant la couronne de victoire des soldats que Dieu lui a remise et qui n’a pour égal aucune autre couronne terrestre, même si tous les joyaux et pierres précieuses de la terre étaient rassemblés. La mort, je le sais, nous touchera de son aile un jour, chacun de nous, mais nous serons heureux si elle vient nous chercher alors que nous remplissons notre devoir, comme l’ont fait nos fils courageux, ceux qui sont morts et ceux qui continuent de le faire. J’espère qu’ils le feront jusqu’au moment de la victoire ultime ou quand la paix viendra régner sur le conflit qui continue de faire rage. Alors, comme vous le dites, quand la guerre se terminera par la victoire pour nos alliés, j’espère que nous comprendrons plus clairement le rôle noble joué par les braves garçons de Terre‑Neuve ainsi que de tous les autres Dominions. Mais si nous n’avions pas participé à la défense de la Mère Patrie et à la paix du monde entier, nous serions restés en arrière et aurions écouté les fanfaronnades des Dominions voisins. Nous serons donc fiers et heureux de pouvoir dire qu’à Terre‑Neuve, en ces temps de trouble, quand l’ennemi a menacé d’étendre son influence cruelle jusqu’à la fin de la terre, que chaque homme d’âge militaire et en bonne condition physique a été un héros prêt à mourir pour son pays. Bien que mon pauvre fils soit mort et que j’ai eu de nombreuses difficultés au fil des années, je suis heureux qu’il soit mort en faisant son devoir. J’espère que cette guerre si cruelle sera bientôt terminée et je vous remercie vous‑même, ainsi que tout le gouvernement, pour vos mots de condoléances.

Votre serviteur,
John Colbert

Source : The Rooms, Archives provinciales, St. John's (T.-N.-L.)

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